vendredi 14 août 2009

Système éducatif

Le système éducatif du Burkina Faso est à la fois proche et différent du système français.

Il en est proche au sens où le pays a calqué le cursus et le nom des diplômes de l'ancien pays colonisateur. Petites exceptions : le CP dure deux ans, et on entre en CP1 à 7 ans. Si tout va bien, on passe donc le bac à 20 ans.

Mais il est rare que cela soit le cas. En effet, le taux de réussite est extrêmement bas comparé à la France, quelque soit la classe. Petit exemple que m'a donné une enseignante : dans une classe (standard) de 6ème de 79 élèves, seuls 26 passent en 5ème à la rentrée. D'après ce qu'on m'a dit, cet exemple n'est pas une exception et au contraire est représentatif (il l'est également pour l'effectif d'une classe !). Dans les années à examen (CM2, 3ème, Terminale), le taux de réussite est encore plus faible. Au niveau du bac, il est exceptionnellement de 40% cette année, contre 25% il y a quelques années (et du coup, bien sûr, les anciens disent que le bac est dévalué ...). Deux raisons invoquées par les Burkinabè avec qui j'ai discuté, pour expliquer ces taux : d'une part, la difficulté du niveau des examens par rapport à leurs homologues français, et d'autre part le manque de pédagogie de beaucoup d'enseignants (mais l'effectif des classes me semble une circonstance atténuante). Les enseignants sont formés à peu près comme en France : recrutement à bac+3 ou 4, une année de formation théorique à la pédagogie, puis une année de stage devant une classe. Ils sont ensuite titularisés, si tout va bien. On ne m'en a pas parlé, mais je pense que beaucoup d'élèves n'ont pas les facilités françaises pour réviser leurs cours chez eux : parents dans l'incapacité d'aider, par manque de temps ou de compétences, nécessité pour l'élève de travailler en plus de la classe pour ramener de l'argent à la famille, ...

Dans le supérieur aussi, le système français a été calqué. D'ailleurs, le Burkina Faso va bientôt passer au LMD (Licence-Master-Doctorat). Le taux de réussite ne semble pas beaucoup plus brillant : environ 20% pour les BTS dont on m'a parlé, idem pour les DUT. Autre similitude avec la France : la grève des enseignants du supérieur ce printemps, pour des histoires de salaires non versés.

La principale différence entre le Burkina Faso et la France vient du fait qu'ici les diplômes (certificat d'études - qui a été conservé, et BEPC notamment) sont des concours, avec un nombre fixé d'admis. De plus, certains élèves réussissent ces concours mais choisissent de "bisser" (redoubler) car ils n'ont pas obtenu de bourse pour poursuivre, et sont dans l'incapacité financière de le faire : ils espèrent l'année suivante atteindre un rang suffisamment bon au concours pour obtenir la bourse gouvernementale. Un élève peut bisser une fois seulement chaque classe, il doit ensuite changer d'établissement ... sachant que le privé n'a pas bonne réputation (à l'exception de quelques établissements catholiques). Pour pallier à ces problèmes engendrés par le manque de ressources financières des parents, un système original de parrainage existe : chaque enseignant se voit réserver deux places dans son établissement ; les parents ou tuteurs des élèves souhaitant changer de collège ou lycée cherchent donc parmi leurs connaissances, ou les relations de leurs connaissances, un enseignant qui accepterait l'enfant dans son établissement. Les enseignants accueillent même ces enfants chez eux, dans le cas où l'établissement est éloigné géographiquement du domicile des parents. Apparemment, ils servent également de tuteur scolaire à ces élèves, et les aident dans leurs études. Enfin, dernière différence avec la France : de nombreux enseignants arrondissent leurs fins de mois en tant que consultant.

Comme le disait Abraham Lincoln, "les hommes naissent libres et égaux, mais c'est la dernière fois qu'ils le sont" : cette petite description/comparaison en est une illustration, à tous points de vue.
A bientôt pour les derniers messages avant mon retour.

PS : suite à ces constatations sur les problèmes financiers et les taux peu élevés de réussite, j'ai soulevé l'idée qu'ACP organise des cours gratuits pour les élèves pendant les vacances, sans savoir si ce concept européen était applicable ici. Après quelques jours de réflexion, Mahamadi a totalement adhéré à cette idée et nous avons rajouté ce projet aux projets de l'association. La location d'un local et du matériel pourrait se faire grâce au partenariat qu'entretient déjà ACP avec quelques écoles du quartier, et la venue d'un Français prêt à enseigner gratuitement (contre la prise en charge de son logement et de sa nourriture, comme moi actuellement) pourrait se faire via Développement Sans Frontières. Les matières visées sont les matières scientifiques plus l'anglais : un étudiant français en fac de sciences serait l'intervenant idéal, vu le faible niveau requis (niveau de primaire, voire de début de collège). Apparemment, il semble difficile de trouver quelqu'un sur place pour assurer cette activité bénévolement, d'où l'idée de faire appel à un Européen.

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Réponse à Fabrice :
Je n'ai assisté à aucun cours ... En ce moment ce sont les vacances d'été ! J'ai juste eu la chance de discuter avec un prof d'histoire-géo, de collège-lycée, et avec bien sûr les autres Burkinabè qui m'ont également donné leur avis.

Je pense qu'ils ont des manuels, mais comme le reste c'est à leurs frais, donc peut-être tous ne l'ont-ils pas ? Je ne pense pas qu'il ait beaucoup d'absentéïsme, en revanche très bonne remarque sur le français : ils font pas mal de fautes d'orthographe, y compris les adultes, et maîtrisent mal les articles ("le", "la", etc.), qui ne doivent pas exister dans leur langue maternelle.

1 commentaire:

  1. "je pense que beaucoup d'élèves n'ont pas les facilités françaises pour réviser leurs cours chez eux": ils ont des manuels ? qu'ils peuvent emener chez eux ?

    parmis les causes d'echec, est-ce qu'il n'y a pas bc d'absentéisme long, pour cause de travail ou maladie ?
    Les cours sont en français, mais les eleves le maîtrisent tous ? (s'il faut etre bon au cours de français pour suivre en math, dur dur les maths).

    question pédagogie, tu as vu des differences ? e.g. est-ce qu'on fait des maths-phys désincarnées comme en France ?
    (fin bon, t'as peut-etre pas assisté à N classes, non plus !).

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